La Cour d’Appel de Grenoble vient de rappeler la responsabilité qui incombe aux sociétés opérant des plateformes de cryptomonnaies, surtout lorsqu’elles agissent sans être enregistrées sur le territoire où elles proposent leurs services. Le Collectif MUSE AVOCATS a obtenu une décision qui met en lumière le devoir d’enregistrement et ses conséquences pratiques, en période où l’actualité internationale ne cesse de rapporter piratages massifs (Bybit, Coinbase), pertes financières ou condamnations — ou encore de récentes actions de l’AMF contre des opérateurs non enregistrés illustrent parfaitement ce climat réglementaire sous tension..
1️⃣ Les obligations fondamentales des sociétés de cryptomonnaies
Dans l’environnement actuel, les sociétés opérant des plateformes de cryptomonnaies doivent respecter une série d’obligations qui garantissent la sécurité des investisseurs et la légalité de leurs opérations :
- Enregistrement auprès des autorités compétentes
La loi PACTE de 2019, consolidée par le règlement européen MiCA, impose à tout prestataire de services sur actifs numériques (PSAN) l’enregistrement obligatoire auprès de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) dès lors que la société vise des clients français. Cette obligation permet aux régulateurs de contrôler l’honorabilité, la compétence des dirigeants, et la conformité des procédures internes.
- Conservation et ségrégation des fonds
Les sociétés doivent garantir une gestion rigoureuse des actifs numériques confiés par les utilisateurs. Cela inclut la ségrégation entre fonds propres et fonds clients et l’obligation de restitution immédiate en cas de demande ou de litige. Le manquement à la conservation entraîne la responsabilité civile de la société en cas de vol ou de fraude sur les comptes utilisateurs. Les juridictions françaises ont confirmé la qualification de dépositaire et exigent un haut niveau de vigilance dans la prévention des détournements.
- Surveillance et contrôle des transactions
La réglementation impose des dispositifs techniques et organisationnels de lutte contre la fraude, le blanchiment et le financement du terrorisme : authentification forte, gel des transactions suspectes, signalement à Tracfin, contrôle du bénéficiaire final. La directive DAC8 renforcera encore l’obligation de transparence et la traçabilité des flux dès 2026, exigeant la communication systématique des opérations à l’administration fiscale.
- Contrôle de l’information et convention avec le client
La transparence des conditions de service, l’information loyale et complète au client et la signature systématique d’une convention sont exigées. En cas de faille (omission, imprécision, défaut de notification), la société expose sa responsabilité contractuelle.
2️⃣ L’incidence du défaut d’enregistrement dans un état et ses conséquences pour les investisseurs
- Incidence pour la société
Opérer sans enregistrement est constitutif d’une activité irrégulière et expose la société à une suspension d’activité, des sanctions pécuniaires et même à une interdiction d’exercice — comme le montre la récente décision du Tribunal des Marchés Financiers canadien sanctionnant des opérateurs non enregistrés. Les juridictions françaises confirment que les opérations auraient dû être suspendues dans l’attente de l’enregistrement, et que tout acte passé en infraction expose la société à la réparation du préjudice subi par l’investisseur.
- Conséquences directes pour les investisseurs
L’absence d’enregistrement prive l’investisseur des protections apportées par l’AMF et de l’accès au médiateur en cas de litige. Les fonds confiés à une plateforme non enregistrée peuvent être perdus sans recours direct, notamment en cas de piratage ou de détournement interne ; les juges exigent alors la démonstration précise du dommage et du lien avec la négligence de l’opérateur.
Le défaut d’enregistrement accroît également le risque de fraude et d’utilisation des actifs pour des opérations illégales, aggravant la vulnérabilité des particuliers en l’absence de contrôle systémique. L’actualité regorge de cas où des centaines de clients français ont été victimes d’escroquerie sur des plateformes non agréées.
- Sanctions et moyens de recours
En France, les victimes peuvent saisir les juridictions civiles et / ou pénales sous réserve de prouver le lien territorial et la négligence de la société. En cas d’opérations transfrontalières, l’action collective devient parfois nécessaire pour avoir plus d’impact. Les sanctions peuvent aller jusqu’à la restitution des fonds perdus, l’octroi de dommages et intérêts ainsi que des pénalités administratives pour la société.
Vous pouvez consulter l’intégralité de la décision rendue par la Cour d’Appel de Grenoble en cliquant ici.
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